Marie Peyrat, marquise Arconati Visconti
Marie Louise Jeanne Peyrat, devenue marquise Arconati Visconti par son mariage avec Giammartino Arconati Visconti, est née le 26 décembre 1840 à Paris. Fille d’Alphonse Peyrat, journaliste républicain, ami de Victor Hugo et de Gambetta, elle manifesta toute sa vie un intérêt passionné pour la politique, ayant été élevée par son père, écrit-elle, « dans le culte des principes républicains ».
Si on ne sait que fort peu de chose sur l’éducation qu’elle reçut, le Journal des Goncourt, qui note à plusieurs reprises sa présence entre avril 1861 et octobre 1862 au théâtre aux côtés de la maîtresse du dramaturge Adolphe Dennery, s’il dresse de Marie Peyrat un portrait peu flatteur : « une jeune fille […], causant de tout, parlant de tout, ayant à peu près tout lu, mais en linotte, ayant pour charme et pour intelligence, assez petite au reste, de jeter en bavardant un mot sur Michelet, sur la Révolution, sur beaucoup de choses auxquelles ne touche pas d’ordinaire la pensée des femmes », nous donne quelques indications sur sa culture.
On sait que Marie Peyrat fréquenta en auditeur libre les cours de l’École des chartes et sans doute également ceux de l’École pratique des hautes études et que c’est, semble-t-il, sur les bancs de la première qu’elle rencontra Giammartino Arconati Visconti, héritier d’une grande famille milanaise, mais né en France, à Pau, en 1839. Celui-ci, avant son mariage, semble avoir surtout mené la vie d’un « voyageur érudit », qui après un premier voyage en Algérie, avait entrepris en 1865 une nouvelle expédition en Arabie Pétrée dont il publia une relation en 1872.
Le mariage, civil, de Marie Peyrat avec le marquis Giammartino Arconati Visconti est célébré à Paris, peu après le décès du père du marquis, à la mairie du 9e arrondissement, le 29 novembre 1873, en présence de Victor Hugo et d’Emmanuel Arago. Il est toutefois de courte durée. Le marquis meurt en effet le 23 février 1876 à Florence, et la marquise, seule héritière de ses biens, regagne Paris.
Elle y fait l’acquisition en 1880 d’un hôtel particulier, au 16 de la rue Barbet-de-Jouy et y ouvre un salon où elle reçoit, un jeudi sur deux, des hommes politiques, républicains de la première heure, tels Léon Gambetta, Émile Combes, Joseph Reinach ou Jean Jaurès, mais aussi des « intellectuels », normaliens ou chartistes, comme Paul Meyer, Auguste Molinier, Gabriel Monod et Abel Lefranc, qui furent parmi les premiers soutiens d’Alfred Dreyfus. Ce dernier en devint lui-même un hôte assidu après son retour de l’île du Diable.
La marquise entretient également des liens d’amitié avec des conservateurs de musée et des collectionneurs comme Émile Molinier, Raymond Kœchlin, Gaston Migeon ou Louis Metman. C’est sans doute par l’intermédiaire d’Émile Molinier qu’elle fait la connaissance de Raoul Duseigneur, antiquaire et collectionneur, avec lequel elle entretient une longue relation jusqu’à sa mort en 1916.