La bibliothèque du château de Gaesbeek
La marquise Arconati Visconti a également témoigné de son intérêt pour la transmission des savoirs par les dons d’ouvrages qu’elle a effectués, à partir de 1909, à différentes institutions. Bien qu’il soit difficile, dans les différents cas, de déterminer le ou les premiers possesseurs des ouvrages dont la marquise dote ces établissements, il semble qu’il s’agisse, pour une part, de livres ayant appartenu à la bibliothèque de son père, Alphonse Peyrat et, pour une autre part, d’ouvrages conservés au château de Gaesbeek dans la bibliothèque de la famille Arconati Visconti.
La marquise avait fait rédiger, à une date qui ne nous est pas connue, mais sans doute postérieure à la mort d’Alphonse Peyrat (1890) et antérieure à 1909, le catalogue des ouvrages conservés dans la bibliothèque du château de Gaesbeek. Ce catalogue, constitué de deux volumes reliés plein cuir, comportant des blasons et des « enluminures » de style médiéval, très similaire dans sa forme à celui comportant l'inventaire des archives conservées au château, rédigé par Jules Van Cromphout en 1887, est actuellement conservé à la bibliothèque de l’École normale supérieure, sous les cotes Ms 2 et Ms 3. Ils nous permet de connaître les lieux de conservation actuels d’une grande partie des 7372 volumes qui y sont répertoriés.
Le premier de ces manuscrits comporte, en face du titre d’un certain nombre d’ouvrages, des mentions marginales au crayon : « donné A », « donné P », « AN », dont on peut penser qu’il s’agit de l’abréviation du nom de l’institution ou de la bibliothèque à laquelle les ouvrages sont destinés ou ont été donnés : les Archives nationales (A, AN) et la Société de l’histoire du protestantisme français (P).
On sait en effet que sur les conseils, semble-t-il, de Gabriel Monod, et peut-être d’Abel Lefranc qui a été archiviste à la section administrative des Archives nationales de 1888 à 1893, la marquise a fait effectuer à compter de mars 1909, au départ du château de Gaesbeck, à destination des Archives nationales, plusieurs envois de caisses de livres. Le « fonds Peyrat » ainsi constitué à la bibliothèque historique des Archives nationales comporte au total 1427 titres, soit 76 mètres linéaires. Chacun des volumes de ce fonds Peyrat porte un double ex-libris, celui d’Alphonse Peyrat, avec la devise : « Vivre libre ou mourir », et celui de la famille Arconati Visconti, avec la devise : « Vivitur ingenio, caetera mortis erunt ». Un nombre important d’ouvrages et d’opuscules concernant notamment la Révolution française et figurant dans le catalogue de la bibliothèque de Gaesbeek où ils sont suivis de la lettre A ou des lettres AN se retrouvent sur les rayonnages de la bibliothèque historique des Archives nationales.
C’est également en 1909 que la marquise Arconati Visconti fait bénéficier la bibliothèque de la Société de l’histoire du protestantisme français d’un don important, qui a sans doute également été effectué par la marquise sur les conseils et à l’instigation de Gabriel Monod. Ces volumes, au nombre d’environ 500, dont certains portent à la fois l’ex-libris de la famille Arconati Visconti et celui d’Alphonse Peyrat, avec cette particularité toutefois que l’ex-libris d’Alphonse Peyrat est toujours apposé sur celui des Arconati Visconti, sont enregistrés sur le registre d’entrée de la bibliothèque sous le nom d’Adolphe [sic] Peyrat. Il s’agit, le plus généralement d’ouvrages à caractère religieux ou polémique, parmi lesquels on peut noter la présence en assez grand nombre d’ouvrages du XVIIe et du XVIIIe siècles.